La psychologisation de la
souffrance au travail ne conduit pas les décideurs à interroger les leviers de
la création de valeur et de la contribution professionnelle, celle qui prête
aux salariés une volonté de compétence, un souci d’agir et de bien faire.
Les activités de service
auraient dû interroger les réflexes hérités de l’industrie. La compétence est
l’aptitude manifestée dans les situations problématiques –non totalement
réglées par une programmation préalable –, à rendre des arbitrages, à prendre
des initiatives et la responsabilité à l’égard de ces situations.
Mais la gestion fonctionne à
travers des catégories, servant à réduire du « complexe » à du
« gérable ». Les catégories aident à voir des problèmes, sous un certain
angle. Elles empêchent aussi de voir les autres angles, et tout bonnement de
concevoir des problèmes. En offrant un prêt-à-penser, elles peuvent empêcher
l’intelligence des situations vives auxquelles sont confrontés les acteurs.
Ces dernières années ont vu
se réduire l’espace accordé à la controverse et les acteurs s’installer dans la
représentation appauvrie postulée par les catégorisations ayant cours. Mais que
reste-t-il de l’organisation ? On est arrivé à un tel point de dilution de
l’action organisatrice qu’elle a tendance à ne plus faire l’objet d’une gestion
à part : il n’y a plus d’organisateur en titre, les centres de décision
sont fuyants.
Tous les « professionnels de la connaissance » (chercheurs,
journalistes, consultants, experts) ont une responsabilité : ouvrir ou
fermer des voies d’action, mettre en lumière ou dans l’obscurité des leviers
pour agir.