Il y a une forme de
schizophrénie entre un discours vantant les mérites de l'innovation, et donc de
la capacité à penser autrement, et la réalité des organisations, qui consiste
bien souvent à promouvoir un comportement lisse, acritique et consensuel.
Afin d'obtenir leur
accréditation, les écoles de management doivent se conformer à des critères qui
valorisent l'hyperspécialisation des enseignants. On s'éloigne de plus en plus
de la figure du professeur, de l'honnête homme capable de stimuler la curiosité
et l’aptitude à exercer son libre arbitre.
Pour être "au plus près
du terrain", les "études de cas" sont à la base de
l'enseignement du management. Mais elles ont tendance à être standardisées,
souvent lissées et consensuelles. Les débats qui découlent de situations plus
critiques, dérangeantes, voire déstabilisantes, ne semblent pas avoir droit de
cité, alors qu'elles font partie de la vie des affaires. Cette autocensure
conduit à un encouragement du conformisme.
Il faut croire aux cours
d'éthique, de développement durable, de responsabilité sociale des entreprises,
… mais il pourrait aussi s'agir de ce qu'Henry Mintzberg appelle des
"remises en cause rituelles" qui servent surtout à apaiser, mais ont
un faible impact.
Comme l'on dit en joaillerie, "étonner", c'est faire une
faille dans un diamant pour mieux le tailler et le faire briller. Il faut
transmettre aux managers une capacité à voir les failles de leurs certitudes, à
mettre en doute les "vérités absolues", et à sortir du piège
séduisant du conformisme afin d'inventer des nouvelles règles.